Nous naviguons sur un vaisseau superbe Jaillit la lumière
sous son étrave Dans le jour la nuit la Terre comme
une lampe Pareil vaisseau appelle un équipage de
Rois Brillent les haubans brillent les ponts Brillent
le gaillard de proue brillent
les mâts
Cent fois nous avons ouvert des yeux éblouis rendu
grâce terrasse à Paris en mais dans
la nuit la surprise du ciel en juin cent fois
nous avons cligné des yeux devant la splendeur &
remercié L’habitude offusque
ces éclats — un pas de côté la beauté
flambe
Peut-être ne devrait-on enseigner au-delà &
qu’alors, seulement, on rendrait grâce à la hauteur
qu’il faut
Jaillit la lumière de son étrave en lui hors de lui é
claboussés nous
frottons nos yeux sans croire i
gnorons que nous porte vaisseau
pareil — Ce qui se peut seulement c’est
ouvrir les yeux dans la lumière
quand même il nous conduirait à notre
perte éblouis fatals ouvrant les yeux nous
remercions
Nous sommes les enfants de ce feu
— il nous enseigne, guide, prend notre main dans
le noir éclatant en nous
hors de nous
Nous sera-t-il jamais donné une parole à la hauteur où nous
la devons attendre — miroir à l’infini
de l’infini des lumières &
des ombres ? En une modulation unique ô qu’elle
révèle, éclaire, témoigne celui qui parle
avec la chose révélée !
Une seule parole juste,
une seule fois. La poésie n’aurait pas
failli.
Nous naviguons sur un vaisseau superbe &
nous pleurons.
Jean-Paul Michel
Ascoli Piceno
1 VIII 97
Pour avoir vu un soir la beauté passer, Le Castor Astral