Nuit d’été

NUIT D’ÉTÉ

La ville entière dans sa clameur nocturne
Déferle en lames sonores

Passant par les hautes fenêtres de la canicule
La basse des rockeurs accompagne sourdement
Le Salve Regina des Intégristes
Rires paroles incohérentes chuchotements
Vrombissements et pétarades

Odeurs odeurs fortes à mourir
Poussières et cendres étouffantes
Pollens volants et chats errants

Les petites vieilles qu’on torture et qu’on assassine
Dans des chambres fermées
Demeurent secrètes et cachées
Jusqu’à la fin
Sans aucun cri perceptible
Dans la ville noire tonitruante
Foires des nuits orageuses
Garçons et filles se flairent
Dans des touffeurs d’étuve
Trafiquent l’amour et la drogue
Sous le néon strident
Sous la voûte sombre des ruelles

Tandis qu’au ciel sans lune ni soleil
Des devins obscurs leur promettent l’étoile parfaite
Délices et mort confondues en un seul éclair.

Anne Hébert
Le jour n’a d’égal que la nuit © Les éditions du Boréal