NEIGE
Je suis allée dans la montagne. J’ai mis mes pas dans ceux d’un homme. Cet homme m’a amenée sur le chemin de la mâture. Là sur ces pierres luisantes, chaude, polies par le siècle nous avons rêvé aux grands voiliers.
C’était le printemps, la houle des hautes futaies vertes assaillait la falaise. C’était le printemps, jonquilles, violette, primevères, hellébores redonnent à nos cœurs comme un second printemps déjà oublié dans la plaine. Les pétales des aubépines et celles des merisiers donnaient au paysage des allures de gâteau de mariée.
Je suis allée dans la montagne. J’ai mis mes pas dans ceux d’un homme. Cet homme m’a amenée de l’autre côté de la montagne, là où la neige tombée pendant la nuit avait poudré la forêt. Les bourgeons des hêtres coiffés de givre, les crocus, dans leur gangue de neige disaient que ce n’était plus le printemps. Les branches des grands pins donnaient au paysage des allures de carte postale de Noël.
Je suis allée dans la montagne, j’ai mis mes pas dans ceux d’un homme et fuyant le brouillard du sommet nous avons retrouvé dans la vallée les soies vertes des prairies cousues entre-elles comme des patchworks ensoleillés du jaune pissenlit.
Marie-France Vincent
Poème lauréat du concours de poésie de la boutique FreyWILLe (Bordeaux) à l’occasion de la Saint-Valentin (14 février 2019)