Cantilènes

 

Marie-Célie Agnant

(extrait)

Aborde ce corps
tel l’archéologue
dépoussière le joyau enseveli
parcours vallons collines grottes et jardins
ici nul plumage trompeur
les arbres portent fleurs et flambeaux
ici tant d’effervescence de splendeurs tues
les morsures sont de cristal
j’ai tissé un linceul pour l’égo
et dans le silence des nuits
j’écoute le chant des étoilesJ’ai la nostalgie de l’abandon
tremblante rivière détournée de son lit
je poursuis ce rêve d’un lointain royaume
sans décombres ni escaliers achalandés
Un royaume rien que pour moi
sans portes ni fenêtres
pour accueillir toute la lumière du monde
et celle de tes yeux
Me manque cet orage qui au mitan du jour
démembre les corps
me manquent le poids du baiser
nos souffles engloutis par les sables du désir
dans les vallons de nos draps

Ouvre-moi une porte dans les nuages
je veux la franchir

accéder aux îles fabuleuses
où vivent chercheurs de rêves banquistes illusionnistes
J’ai faim de délires de trémolos
offre-moi une ligne plus loin que l’horizonJe voudrais tant pour une fois
être femme sans armure
sans autre histoire
que celle de ta bouche
Berce mon cœur avec un conte de fées
où tu joues tous les personnages
je te laisserai cueillir mes songes et saisir à pleines mains
la fulgurance de mes désirs
puis de ma langue et de mes dents sur ton corps
j’écrirai
notre pacte secret

Invente-moi un rituel
je me ferai lune pleine
lune ronde
lune bleue
Ivre et curieuse
infatigable
j’épellerai tes cils
je nommerai tes pores
Mes bras mes seins mes cuisses
et la fleur de mon nombril
te rappelleront alors cette langue oubliée des humains

Marie-Célie Agnant (Québec)

Source :Lyrikline