Toucher la lumière
Par une nuit de pleine lune
essaye de fixer la galaxie
Tu verras qu’elle est cours d’eau
avec tes bras pour affluents
ta poitrine pour estuaire
Aujourd’hui le ciel a écrit son poème
à l’encre blanche
Il l’a appelé neige
Ton rêve rajeunit tandis que tu vieillis
Le rêve grandit en marchant
vers l’enfance
Le rêve est une jument
qui au loin nous emporte
sans jamais se déplacer
Le nuage est las de voyager
Il descend à la plus proche rivière
pour laver sa chemise
A peine a-t-il mis les pieds dans l’eau
que la chemise se dissout
et disparaît
Une rose sort de son lit
prend les mains du matin
pour se frotter les yeux
Le palmier parle avec son tronc
la rose avec son odeur
Le vent et l’espace vagabondent
main dans la main
Arc-en-ciel ?
Unité du ciel et de la terre
tressés en une seule corde
Il marche sur les versants de l’automne
appuyé au bras du printemps
Le ciel pleure lui aussi
mais il essuie ses larmes
avec le foulard de l’horizon
Quand vient la fatigue
le vent déroule le tapis de l’espace
afin de s’y allonger
Dans la forêt de mes jours
aucune place
sauf pour le vent
Pour toucher la lumière
tu dois t’appuyer sur ton ombre
Je sens parfois que le vent
est un enfant qui crie
porté sur mes épaules
Comment décrire à l’arbre
le goût de son fruit ?
A l’arc
le travail de la corde ?
Telle une main
la lumière se déplace
sur le corps des ténèbres
C’est l’épaule de l’espace
qui s’effondre là-bas
sous les nuages noirs
L’espace dans l’œil de la guillotine
est lui aussi tête à couper
Tu ne peux être lanterne
si tu ne portes la nuit
sur tes épaules
Je conclurai un pacte avec les nuages
pour libérer la pluie
Un autre avec le vent
pour qu’il nous libère
les nuages et moi
La parole est demeure dans l’exil
chemin dans la patrie
Qu’il est étrange ce pacte
entre les vagues et le rivage –
le rivage écrit le sable
les vagues effacent l’écriture
Mémoire – ton autre demeure
où tu ne peux pénétrer
qu’avec un corps devenu
souvenir
Adonis
Toucher la lumière (1997) – Traduit de l’arabe par Anne Wade Minkowski
Hier, descendant de la montagne ,
Plusieurs événements merveilleux, pour un enchantement infiniment
Délicat .
Suivant notre chemin de terre rouge,
Nous marchions parmi les pottoks
Qui semblaient nous ignorer,
Tout occupés à leur déjeuner,
Broutant l’herbe fraîche .
Pottoks amoureux,
Et chef de groupe,
Pottoks juste nés
sur leurs pattes frêles ,
Suivant leurs mères nourricières.
Patience et silence
Ils nous ont acceptées .
Venant nous renifler et ressentir
Qui nous étions…
Dialogue
D’égal à égal .
Intimidés tous et toutes
L’espèce rare et délicate
Acceptait notre approche
Prudente et intimidée toute autant.
Soudain le vent
tourbillonnant
Sifflant.
Le sorcier
Chantant
Et le flûtiste invisible
Nous contaient les légendes du printemps basque.
C’était la première fois
Je n’avais jamais vu
Jamais entendu
Le vent me jouer de la flûte de pan
Ni écouté une telle petite mélodie qui me restera dans le cœur.
L’invité invisible,
L’exilécouter a son âme près de nous
le rescapé des voyages sans retour
Nous adressait sa litanie légère
En notes de vent .
Et nous ne voulions plus qu’il s’arrête de jouer de sa flûte cosmique.
Là-bas dans les montagnes basques,
Pour la première fois depuis longtemps
Depuis toujours ,
Les mélodies flûtées d’un indien d’Amérique me sont aussi parvenues .
Par un beau jour de soleil & de vent
À 926 mètres au-dessus de l’océan Atlantique ,
Artzamendi et falaises aux vautours lyriques de beautés simples.
Inolvidables.
L’enregistrement n’a rien donné.
On n’entend que le vent puissant
Mais je sais bien , qu’il y avait un amérindien qui nous accompagnait de sa flûte .
La brume était en bas sur Itxassou ,
Mais non , elle était plus bas .
La brume polluée s’étalait sur Biarritz & Bayonne, jusqu’à l’Adour
Et là haut les vautours fauves guettaient leurs proies
Plongeant sur elles
S’arrogeant Le droit de carnage
Pour satisfaire leurs ventres.
Les Pottoks, eux continuaient de s’ébrouer, et brouter , non sans être venu mettre leurs museaux dans nos mains vides mains tendues vers eux.
Les moutons et agneaux encore enneigés de leurs laines
Gambadaient joyeusement
Jouant à se poursuivre,
les agneaux agiles
Réclamaient aussi leur dû de lait maternel bienfaiteur.
C’était avant
C’était hier
Et maintenant que nous partons
Nous restera cette flûte en tête
Et nos yeux grands ouverts vers
L’horizon,
le futur retour
À moins que ce ne soit
Le retour vers le passé inconnu .
V
C’était là haut…
Fue allá arriba que todo sucedió, que encontré aquello que no sabía que buscaba.
Montamos, dejando atrás de cada paso un peso innecesario.
Las leyes de la física nos demuestran bien que debiéramos sentir la presión aumentar. No fue así.
Mientras más cerca estábamos, más podríamos haber jurado a quien preguntase si pudiésemos volar.
Alcanzamos una ligereza total, ligada en absoluto a lo físico.
Fue una transmutación perfecta de aquella bruma mental en aquello que « muere al último » (como nos dicen siempre).
La esperanza.
Fue el camino de la perfecta representación de la vida.
Andar, gozar, ser pacientes… no para conquistar, sino compartir con otros seres vivos, coexistir.
Sentir las caricias del viento, apreciar.
Ser recompensadas por una melodía mágica irrepetible e inolvidable. Misterio total.
Llegar a la cima, grito del alma e
Como símbolo de cohesión total alma-universo.
Una nueva cumbre por conquistar. Privilegiada compañía de ensueño.