Nous avons beau nous éloigner
le paysage ne nous quitte pas
Qu’il s’ouvre comme un livre d’heures
à chaque levée matinale des arbres
sur les talus
nous le savons en nous lové
si intérieur
qu’il instille sa sève goutte à goutte
dans notre sang
jusqu’à se ramifier
Et si marcher n’était
qu’aller à sa rencontre
pour mieux s’empayser des autres ?
Et si écrire ou lire
n’était que traverser sa vie
comme on traverse un paysage,
laisser à la neige des pages
le soin de consteller
le silence des marges,
à ces mots simples le pouvoir
de ralentir le cœur,
le pouls de la pensée ?
Désir
D’accorder nos regards
– seule harmonie
qui nous requiert –
à cette extase des lointains
Là-bas
tremble l’indécision tonale des lisières
ou l’horizon se perd de vue
pour être tout entier
respiration des brumes
Il n’y aurait que les étoiles
à rêver tout haut en plein jour,
et nous, veilleurs,
debout entre l’âme et le monde,
par quelle familière étrangeté
nous n’aurions qu’à tendre la main
pour accueillir l’instant
du rossignol et qu’à nous élever
jusqu’à hauteur d’enfance
délestés de nous-mêmes
en pauvres hères dans la clarté nue
de nos prières