1.
une dérive d’intuitions
l’enchaînement rapide
de la mort et de la vie
la beauté du site
2.
surtout ne pas faire semblant
que le monde s’est arrêté
vlan flèche au liane humaniste
surtout regarder
empiéter sur la blessure
une dernière description
œuvre d’art ou rien du tout
3.
se tenir inutilement mouillée près de
la violence la réalité ou la vérité
les mâchoires pleines d’énergie
je crois qu’il faut des mots simples
marcher longuement la nuit écouter
le son de l’eau qui persiste
raccourci fiévreux dans l’universel
4.
un soir d’été à une autre femme
je dis toucher n’abolit pas la distance
tout est pratiquement réel
plus personne n’arrive à marcher dans l’absolu
je dis toucher ou caresser à quia
5.
la main tendue telle quelle
sans autre argument que l’horizon
quelques mots pour me détourner
de l’impression que nous avons mal
là où rien ne ressemble à rien
6.
alors j’ai pensé au mot destruction
et à tout ce qu’il faudrait rassembler
(été, jazz, corps à corps et tango,
immensité, jardin, rivage et quelques
insectes)
pour éviter de voir
son propre corps à très grande vitesse
recomposer croisant les certitudes
la nuit puis chaque nuit encore la nuit
7.
avoir lieu toute une vie
dans sa langue maternelle
joie de vie l’avoir là où elle passe
rivière creusant sa métaphore
pas d’agonie
seulement le récit
8.
cette fête et choc de la répétition
dos à dos l’humanité ses petites lèvres
parlant encore russe, arabe et mandarin
le long des mers et des rosiers
cette procession de vie
«Là, où est la tombe de ma mère* »
Nicole Brossard
Au présent des Veines © Les Écrits des Forges
* Tatiana Chtcherbina