Rives de l’Ondava


J’ai déjà bu ce vin, assis à cette table.
Un jeune officié débourbé du service
grignote des graines de tournesol.
C’est un soir que la musique attriste.
Le ciel est à l’orage. La luzerne pousse.
Les taureaux tapent leurs cornes avec fracas.
On se dit qu’il va pleuvoir.
Un ange mouillera son habit
en entrant dans la nuée.
Mais c’est le chien des maîtres qui approche,
frère de la fidélité, frère de l’esseulement.
« Bâille un peu, lion, que je compte tes dents ! »
La rivière aux eaux pleines
a des couleurs de citron pourrissant.
On se dit que le cœur de l’homme est une sébile
où ne tombe que la pluie.
On a des pensées tristes
pendant que les filles attendent qu’on les embrasse
et les chevaux que tintent les éperons.

Jean-Baptiste Para