Un à un

Abdellatif Laâbi


Un à un
les rêves viennent mourir sur la page
Ils se sont donné le mot
ils viennent de partout
pour mourir sur la page
comme les éléphants dans leur cimetière
J’assiste à leurs convulsions
ne peux tendre un verre d’eau
je les regarde pour la première fois
pour la dernière fois
avant de les envelopper dans le suaire de mes mots
et les déposer sur la barque menue
qui fut jadis leur berceau
Le courant les emporte
et bien vite me les ramène
comme si le large n’était pas là-bas
mais ici sur la page

Abdellatif Laâbi

L’étreinte du monde (La Différence)