Stratford
L’une avait des cheveux blonds
Et ne les penchait guère
Que sur les redoutables héros de ses livres.
Quand ils se battent pour une captive
Aux jambes encore entravées; l’autre
Portait un corsage couleur de lièvre
Sans rien d’éperdu dans sa forme
Et s’essayait au tremblé de la voix
Pour faire vrai quand elle disait qu’aucun air
N’innocente un monde à faux proverbes
Et meurtres cachés.
Elles avaient appris
À se connaître en aimant
Hamlet
Et les hommes hésitants, à
Stratford,
Comme il convient.
Dans la fumée,
Les cris du pub, l’acteur démaquillé
Avait aussi lampe des bières sans fin,
Tandis qu’Ophélie riait chaque nuit
De plus en plus haut, en gagnant
Contre de vrais gaillards
Des parties de fléchettes rouge et or.
Les gens parfois chantaient
O mistress mine..
Et certains finissaient par se prendre la main.
Il y eut même un soir une vraie foudre :
Edmund,
Bâtard de
Lear, et le silence chargé d’armes
Soudain, de craquements de planches,
De mots obscènes contre les héritiers :
Toi,
Nature, Ô ma déesse…
Elles rentraient tard,
Sous un vertige d’étoiles, festin de rythmes
Filant par-delà les questions vers l’ombre bleue,
Buissons, flocons et lèvres de la rivière.
Cherchant l’issue, cherchant les impensables
Fleurs lucides, et s’arrêtant ensemble
Au rebord de jardins ensauvagés pour mieux
S’imaginer chaque syllabe sans cesse
À bout de branche, à bout d’idée
Nouvelle et de dépense avide : comment
Échapper au legs, comment devenir
Quelqu’un d’autre, à sa juste distance.
Et moyen pour les yeux de ne jamais
Durcir ce qu’ils regardent, même quand
La vie va prendre cette forme unique :
À l’avenir présentez-vous dans les délais.
Quelque chose était là malgré tout dans les haies
Parmi les liserons ; il faudrait vingt ans
D’oubli pour en retrouver la douceur.