Et l’étranger répond à ta soif

Un homme endormi éclaire la terrasse blanche de ton logis.
Un autre amour l’aurait accompagné avant minuit.
Un autre jour l’aurait égaré sans sa bonne étoile.
Il semblerait que le silence s’est accroupi sur ta bouche.

Puis le chant de l’aube te réconcilie avec son itinéraire.
Son corps, à la mort, semble perpendiculaire.
Tes cheveux semblent surnaturels lorsqu’il pose sa main
Sur ton front, ils te rappellent que nul ne rêve du matin.

Tes paupières bougent comme deux grenouilles enfouies
Dans la boue du lac, elles tressautent en cadence.
Deux figues sombres s’éclairent d’un puits d’eau.
Tu voudrais les cueillir si l’astre ne s’y mélangeait pas.

Puis la nuit se retire dans une respiration âpre.
Retrouvant la colonne vertébrale du dromadaire,
Elle traverse son corps alourdi par l’escalade des images,
Puis toise vivement un passager sans identité.

Tu le rencontres dans son visage, quand ton autre pays
Frôle des plaines sans fin et des mers sans désolation.
Tu es bouleversée de la conviction intime du rêveur.
« Si l’étranger semble perdu, à quoi bon dénoncer sa solitude ? »

Khal Torabully
édition
printemps des poètes, 2015