Pour la poésie

Pour la poésie

Si je ne perds pas mes forces,
Si je puis dire quelque chose,
C’est que tu es ma volonté et ma force.

Là est le sens de mon chant,
Là est l’accusation de mes mots
Et le simple secret de mon être.

Tu conduis mon âme
Par la mer et la terre,
Les plantes et les bêtes.

Tu me protèges des balles,
Juillet tu me le ramènes,
À la place des décembres éternels.

Tu cherches le bon passage,
Tu portes l’eau fraîche
À ma bouche toute sèche.

À toi je suis lié
Par toi irradié,
Je vais sans peur dans les ténèbres.

Varlam Chalamov

(Vologda, Russie 1907-1982) – Cahiers de la Kolyma et autres poèmes (Éditions Les Lettres Nouvelles-Maurice Nadeau, 2016) – Traduit du russe par Christian Mouze.