Poussières de juillet

Poussières de juillet

Le  sang
Reprend  racine
Oui
Nous  avions  tout  oublié
Mais  notre  terre
En  enfance  tombée
Sa  vieille   ardeur  se  rallume

Et  même  fusillés
Les  hommes  s’arrachent  la  terre
Et  même  fusillés
Ils  tirent la  terre  à  eux
Comme  une  couverture
Et  bientôt  les  vivants  n’auront  plus  où  dormir

Et  sous  la  couverture
Aux  grands trous  étoilés
Il  y  a  tant  de  morts
Tenant  les  arbres  par  la  racine
Le  cœur  entre  les  dents

Il  y  a  tant  de  morts
Crachant  la  terre  par  la  poitrine
Pour  si  peu  de  poussière
Qui  nous  monte  à  la  gorge
Avec ce vent  de  feu

N’ enterrez  pas l’ancêtre
Tant  de  fois  abattu
Laissez-le renouer la trame  de  son  massacre
Pareille  au  javelot  tremblant
Qui  le transperce
Nous  ramenons  à  notre  gorge
La  longue  escorte  des  assassins.

Kateb Yacine (Algérie)