Chanson

Chanson

Toi, à qui je ne confie pas
mes longues nuits sans repos,
Toi qui me rends si tendrement las,
me berçant comme un berceau ;
Toi qui me caches tes insomnies,
dis, si nous supportions
cette soif qui nous magnifie,
sans abandon ?
Car rappelle-toi les amants,
comme le mensonge les surprend
à l’heure des confessions.

Toi seule, tu fais partie de ma solitude pure.
Tu te transformes en tout : tu es ce murmure
ou ce parfum aérien.
Entre mes bras : quel abîme qui s’abreuve de pertes.
ils ne t’ont point retenue, et c’est grâce à cela, certes,
qu’à jamais je te tiens.

Rainer Maria Rilke

Une réflexion sur « Chanson »

  1.  » Les romanciers ont beaucoup à apprendre des poètes, ces sourciers de l’inouï, ces multiplicateurs de sens. « .
    In
    Les Personnages
    Sylvie Germain
    Collection L’Un Et L’Autre
    Gallimard
    Pages 42.43.44. Et de citer Paul Celan dans son très beau texte, lumineux à propos et autour du mot allemand : Wundgelesenes : du lu meurtri, de la blessure lue, rendue lisible.

    « Un jour que le soleil, pas lui seulement, avait sombré, s’en fut alors, quitta son logis […], et avec lui s’en fut et s’en vint, s’en vint clopinant, se fit entendre, s’en vint bâton en main, s’en vint foulant la pierre, m’entends-tu, tu m’entends, c’est moi, oui, moi, moi que tu entends, que tu crois entendre, moi-même et l’autre […] le bâton fait silence, la pierre fait silence, et le silence n’est pas un silence, pas une parole n’y est tue, et pas une phrase, c’est là une pause sans plus, c’est une parole en défaut , c’est une place vacante, tu vois toutes les syllabes à l’entour dressées … « .

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