Pour une jumelle qui n’a jamais eu de robe de soie

Peut-être
que je vis deux vies
une pour elle et une pour moi
et que je ne regarde jamais dans les miroirs.

Qui est la femme
qui monte à cheval
se coupe le visage avec ses bagues
joue au poker
chante Haendel et collectionne les pierres ?

Qui est la femme
qui aime les choses brisées mange des orchidées
qui ne dort ni ne rêve
et goûte la rosée et le sang ?

Qui est la femme
qui dessine les lignes de sa main
et cherche des balançoires ?
Qui est la demi-chance
du bréchet ?

il y a encore des sillons
sous mes côtes
là où elle se reposait contre moi.

Jennifer Clement

Traduit de l’anglais par Marie Evangéline Arsenault
In Un siècle de poésie mexicaine, Anthologie
Editions Ecrits des Forges / Le castor Astral, 200

4 réflexions sur « Pour une jumelle qui n’a jamais eu de robe de soie »

  1. Bonjour
    Merci pour ce poème magnifique, touchant, remuant.

    Je me permets de vous en envoyer deux sur le même thème si cela vous intéresse.

    Lucie Meunier

    1. Voici deux poèmes sur ce thème.

      Jumeau

      Alors te voilà…
      Je t’ai tellement cherché !
      Recule un peu, là, tes bras et tes yeux
      À l’époque tout juste formés

      Je voulais te sentir
      Près de moi, à côté

      Regarder tes sourires
      Pas encore ébauchés

      Quand j’ai senti partir
      Tes forces, tes piliers

      Les structures de ton corps
      Les empreintes de tes doigts
      Les rythmes et les volutes
      Qu’on formait tous les deux

      Je n’ai pas tout saisi
      J’ai cru ma maladresse
      Responsable de ta perte

      Un inspire de surprise
      Qui transforme en effroi
      Mon envie de te suivre
      D’être encore contre toi

      Et ton cœur qui se greffe
      À l’intérieur de moi
      Qui bat et puis qui reste

      Avant l’ange et son doigt
      Se posant sur ma bouche
      Pour oublier les temps de notre construction
      Et même tous ceux d’avant
      De notre folle union.

      ——-

      Toi mon jumeau
      Tu es à l’image des bulles de bain et des nuages
      Tu t’es formé comme tu as pu
      T’es dispersé
      Et je t’ai bu

      Il m’est resté un appendice
      Qui s’est greffé comme un indice
      De ta présence à mes côtés

      Tu es le rythme, l’eau et l’air mélangés.

      Lucie Meunier

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