Mauvais commencement

Mauvais commencement

Parce que ce n’était pas ainsi
(ni c’est ainsi) :
La lune n’éclairait pas compatissante le spectacle
des chasseurs dans la neige de Brueghel,
comme elle n’éclairait pas avec la même compassion la mauvaise haleine
du rêve où un champ blanc
continuait jusqu’à la fin du monde (s’il est vrai que cela termine),
ni encore moins l’équation que faisait un enfant, de l’autre côté du
monde, dans sa classe de mathématiques,
sous un regard décoloré de maître
aussi décoloré et aveugle
      qu’un ciel d’hiver
      décoloré et aveugle
avec des chasseurs qui vont nulle part, couverts par leurs
chiens décharnés
sombres comme eux
aussi aveugles
aussi décolorés
qu’eux.
J’ai dit :
Parce que ce n’était pas ainsi
parce que ce n’est pas ainsi :
il y a plus de choses dans le ciel et sur la terre, Horace,
que quelques chasseurs peints,
qu’une mécanique si calme de ce qui se dissout
de
ce
qui
se
      dissout.

Liliana Díaz Mindurry (Argentine)

Une réflexion sur « Mauvais commencement »

  1. Le poème de Liliana Diaz Mindurry en Argentina rejoint peut-être ce nouveau livre printanier et réjouissant , rencontré lors d’une Escale du Livre 2017 , Olympique toujours.
    Mais escale particulièrement émouvante aussi, dans un contexte criant d’intolérable & insoutenables réalités ici ou là.

     » Pieter Bruegel était un homme pas très grand avec une prestance certaine » raconte l’auteur -peintre Jean -Michel Bénier , édité chez ZERAQ à Bordeaux.
    Bruegel galopait D’Anvers à Venise , faisant route , dans un même élan pour raconter l’usage du monde , dans ce  » grand tour  » , notamment sur ces chemins d’Europe et l’écrivain admiratif ,
    Jean -Michel Bénier lui court après . Bruegel le surnomme  » Bambino » !
    L’auteur nous embarque lentement & joyeusement dans son grand tour où il nous donne foule de détails sur son peintre tant aimé.
    Pourquoi Bruegel ?
    « Parce qu’il part et il revient le même  »
    « Parce qu’il est le peintre du peuple. »
    C’est aussi pour cela que je plonge dans ses tableaux , au Prado et ailleurs
    Fils & Père : leur récits picturaux nous ont enseigné beaucoup.
    Bruegel est un des premiers peintres à avoir peint la montagne , le Val D’Aoste
     » La mauvaise saison « .
    Et au détour de ce voyage initiatique , dans La Villa des Évêques ( cherchez donc où elle se trouve …) , l’auteur va voir une fresque de Bruegel réalisée avec un autre compagnon flamand , plus exercé à l’art des peintures murales  » a fresco ». A fresco
    c’est dire : peinture à la chaux sur les murs frais , peinture très technique car il faut peindre très vite dans ce frais.

    On découvre aussi dans ce beau livre initiatique ( par procuration , en attendant de chausser ses godillots usés ) l’autre Bruegel , fils de , et que Pieter découvre avec l’écrivain à Besançon
    Le temps d’à peine 4 siècles séparent Bruegel & Bénier , mais ils nous prouvent combien l’Europe est celle des êtres en mouvement et pas seulement celle des économies virulentes, défaillantes et déshumanisées.
    Et je pense aux marcheurs de Compostelle et autres optimistes incurables, et vice versa , aux fatigués qui se soignent en marchant, aux utopies sur les chemins sinueux , aux échanges sans frontières pas par nécessité, ou fuite mais par curiosité de l’autre et joie de se découvrir .
    Les bambini d’Erasmus sont / seront notre espoir d’un monde plus beau
    Peut-être .

    Et bien sûr regarder le sublime film vu à Utopia ( en 2014? 2015? …) :
    La Croix et le Moulin
    Chef d’œuvre .
    Autre plongée fantastique dans l’univers réel de Bruegel, du temps des españols ( très rouges sang) en terres flamandes.

    Véronique C Chastelier

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